Imposant corps céleste de 555 kilomètres de rayon des régions de l’espace situées au-delà de l’orbite de Neptune, Quaoar est connu pour avoir brièvement détenu, en 2002, le record du plus gros objet du Système solaire découvert depuis Pluton (1 186 km de rayon). A en croire les travaux présentés dans la revue Nature du 2 février, il pourra désormais se prévaloir d’une autre particularité : celle de posséder l’anneau le plus bizarre jamais repéré. Bruno Morgado, de l’université fédérale de Rio de Janeiro, Bruno Sicardy, de l’Observatoire de Paris-PSL, et leurs collègues sont parvenus à détecter ce disque de débris en recourant à la méthode des occultations stellaires. Surtout, ils l’ont caractérisé avec suffisamment de précision pour mettre en cause les théories en vigueur sur les conditions de formation de ce type de structure.
Comptant parmi les merveilles du Système solaire, les anneaux planétaires ne correspondent pas, à proprement dit, à des objets. Mais à des zones de l’espace occupées par une myriade de fragments de toutes tailles. Du résidu de quelques centimètres à la petite lune. Si le disque de Saturne est le plus fameux de tous, d’autres couronnes, moins larges, moins denses ou faites d’une matière plus sombre, entourent aussi, complètement ou partiellement, Jupiter, Uranus et Neptune. Et il en serait de même, a-t-on appris, en 2014 et en 2017, de certains astéroïdes et planétoïdes, comme Chariklo et Hauméa.
Ces entités datent-elles de l’époque de la formation des planètes du Système solaire ? Ou sont-elles le résultat, plus tardif, d’une collision avec un objet extérieur ou de la destruction d’une lune ? Les astronomes ne se risquent pas à proposer un scénario. Mais remarquent que tous ces disques orbitent à faibles distances de leur corps céleste, en deçà de la « limite de Roche » – du nom du mathématicien et astronome français Edouard Roche (1820-1883) –, qui détermine la région où l’action des forces de marées exercées par un objet est suffisante pour disloquer un satellite.
Observation des occultations stellaires
La couronne repérée par le groupe de Bruno Morgado et de Bruno Sicardy autour du planétoïde Quaoar se situe bien au-delà de cette limite. Une découverte réalisée grâce à l’observation des occultations stellaires. Ce procédé éprouvé de l’astronomie permet de réunir des informations sur des corps du Système solaire trop petits ou trop lointains pour être aisément étudiés par d’autres moyens. Les dimensions, la forme, l’éventuelle existence d’un anneau ou d’une atmosphère sont rendues accessibles simplement en analysant ou en chronométrant la baisse de luminosité occasionnée par le passage de ces objets devant une étoile. Du moins, lorsque l’on parvient à détecter le phénomène, ce qui n’est pas toujours possible en raison des incertitudes sur la position et le mouvement des astres. Un problème que connaissent bien les amateurs et les professionnels, souvent confrontés à la difficulté de prédire dans quelle étroite bande de la surface du globe terrestre – sa largeur doit être égale au diamètre de l’objet étudié – il leur sera nécessaire de déployer leurs équipements.